• Pas à pas: Ébauche de la planche

     Premières étapes: les dialogues, le découpage et l'ébauche

     Première ébauche de la planche

     

    Une fois le découpage réalisé (dans le cas d'une collaboration entre scénariste et dessinateur, c'est ici que le travail de scénariste s'arrête), j'entame la première ébauche de la planche, qui est toujours un brouillon. Sur cette feuille je jette la disposition des cases, et leurs proportions. J'esquisse également les personnages avec plus de détail que précédemment. Cette étape peut remplacer celle des bonshommes bâtons.

     

    Note : En réalité, je dessine les bonshommes bâtons dans un carnet, sous le découpage, pour le cas assez probable où je perdrais l'ébauche sur feuille libre. Même si le gribouillage du carnet ne peut se soustraire réellement à l'ébauche à cause de son manque de détail, c'est déjà un bon début si comme moi on a tendance à tout égarer (il faut veiller alors à ne pas perdre le carnet).

    Vous pouvez voir en dessous une photo du carnet en question.

    Pas à pas, la réalisation d'une planche Kootenay, planche 5

     L'ébauche reste très sale, je suis souvent la seule à savoir la déchiffrer. C'est pourquoi je note beaucoup de choses au bout de flèches. En effet, la raison pour laquelle je m'arranger pour réaliser ces étapes tôt dans la journée est la suivante : bien souvent, je jette les idées sur le papier, et dès le lendemain, je suis incapable de comprendre ce que j'ai dessiné, en particulier si cela a été réalisé la veille entre 23h et minuit, ce qui est souvent le cas. C'est pourquoi je m'arrange pour commencer le crayonné la même journée (dans l'idéal je terminerai le crayonné et même l'encrage dans la foulée, mais cela reste pour le moment une utopie). Les flèches m'aident à m'y retrouver quand je termine les crayonné dans les jours suivants.

    Voici un scan de l'ébauche au moment où je rédige le début de l'article (d'autres notes sont susceptibles de s'ajouter).

    Pas à pas, la réalisation d'une planche Kootenay, planche 5

     Je sais grosso modo les proportions de l'espace occupées par les cases, sans en connaître les dimensions exactes. En fait, je trace d'abord les cases puis j'estime à peu près à quelles fractions de planche elles correspondent pour me simplifier les calculs ensuite.

    Pas à pas, la réalisation d'une planche Kootenay, planche 5

     L'ébauche est également le moment d'apporter de nouvelles petites modifications. Ici, par exemple, vous pouvez noter l'apparition d'une nouvelle case. La réalisation de l'ébauche est également le moment de se poser des questions pour que la planche soit cohérente. J'accorde les gestes aux paroles des personnages. Je vais vous détailler ici ma réflexion case par case:

     

    Case 1 : Dans la case précédente (planche 4) Gabriel, qui est dehors, sous la neige, en chemise et tee-shirt, tient le col de sa chemise remonté contre sa joue pour se protéger du froid. Est-ce que je conserve cette attitude sur cette nouvelle case ? Ici, il tend les mains vers Sophie en lui proposant de prendre son sac, il serait donc plus logique qu'il ait lâché son col. Il tient la lanière du sac de Sophie pour l'encourager à lui confier ses affaires.

     

    Case 2 : La plongé n'était pas vraiment justifiée, mais elle me permettait d'expérimenter un nouvel angle de vue. Ici, je veux m'arranger pour que les têtes de Gabriel et Sophie soient à hauteur équivalentes malgré la petite taille de Sophie. Un jeu sur la perspective rendra cela possible lors du crayonné, je ne m'appesantis pas dessus pour le moment. En revanche, se pose la question du sac. C'est un sac doté d'une sangle que Gabriel porte sur l'épaule ; mais quelle épaule ?

    Je modélise donc le mouvement avec un de mes sacs. Je décide qu'à cause du poids, Gabriel l'aura passé en bandoulière pour se donner plus d'équilibre. Il est gaucher, comme moi, et en refaisant le mouvement, je passe naturellement la sangle au dessus de ma tête de manière à la poser sur mon épaule gauche, alors que le sac pend de mon coté droit. Il en sera ainsi pour lui aussi.

    Je me fais alors la réflexion qu'au niveau de la continuité du mouvement, on a une sorte d'ellipse : Gabriel propose de prendre le sac, Gabriel a le sac. Il serait plus logique d'ajouter une case intermédiaire qui explique comment on en est arrivé là. C'est à ce moment là que je décide d'ajouter la case 1 bis.

     

    Case 1 bis : Elle représentera Gabriel passant le sac sur son épaule. Pour donner du mouvement, je décide de figer l'image sur le moment où il passe la sangle au dessus de sa tête. Se faisant, il se fait la réflexion que le sac est lourd, ce qui explique qu'il passe la sangle en bandoulière et ne se contente pas de la poser sur son épaule, auquel cas le sac glisserait. Pour la cohérence, je veille à ce que la sangle soit à gauche sur l'épaule, et le sac à droite.

     

    Pas à pas, la réalisation d'une planche Kootenay, planche 5

     

    Case 3 : Sur cette case, on voit toujours le sac. Je fais attention au sens. Gabriel indique la direction d'où il vient, dans son dos. Comme c'est l'endroit où ils vont retourner, donc le futur endroit où ils vont se tenir, je poursuis ma réflexion sur la cohérence en y ajoutant une nouvelle dimension qui elle est temporelle. Dans le manga, le sens de lecture se fait depuis la droite vers la gauche. On peut donc assez facilement établir un parallèle avec la chronologie : la droite désigne ce qu'on a déjà lu, et donc le passé des personnages. La gauche, que l'on n'a pas encore lu, est donc leur futur. Le présent est la case que l'on lit à l'instant. Dans le cas de Gabriel et Sophie, leur futur se situant dans le bar de Zach, j'indique sa position comme étant à la gauche de la case. Gabriel se situe donc à gauche, et Sophie à droite. J'avais conduit ce raisonnement auparavant (vous remarquez que la disposition des personnages était déjà décidée) mais je la détaille ici. Le dernier point à tirer au clair est cette histoire de gant. Dans la case précédente, Sophie avait retiré son gant pour manipuler son téléphone. Elle est droitière. Après un rapide sondage auprès des membres du forum il était apparu que les droitiers tenaient leur téléphone de la main droite. C'est donc ce gant qu'elle a retiré, et qu'elle remet sur cette case.

    Ce cheminement de pensée m'amène à me dire que je n'ai pas montré Sophie rangeant son téléphone : elle l'a toujours à la main dans la dernière case de la planche 4, et elle ne peut pas le ranger case 1 puisqu'elle est occupée à donner son sac à Gabriel. C'est donc dans la case 2 qu'elle le glissera discrètement dans sa poche. Il n'y a pas besoin d'en faire étalage à coup de gros plans, mais ce geste renforce la cohésion entre les cases.

     

    Case 4 : Gabriel et Sophie font route vers le bar. Gabriel étant plus grand, et puisque c'est lui qui parle le plus, je le mets dans le fond. Ainsi il nous fait face en regardant Sophie, et il ne la masque pas. Je fais attention à la sangle du sac.

    Pas à pas, la réalisation d'une planche Kootenay, planche 5

     

    Case 5 : Rien de compliqué encore une fois au niveau de l'ébauche. Je place sommairement Gabriel et Sophie qui sont de nouveau réduits à des bonshommes bâton. Je repère les points focalisants de l'image en essayant de placer leurs têtes dans ces zones.

     

    La prochaine fois, nous entamerons la construction de notre planche au propre.  Pour accéder à la suite du pas à pas, c'est par ici!

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